Valeur, sens et sensibilité : la polarisation des valeurs...

Publié le par Pierre GAPENNE

Valeur, sens et sensibilité : la polarisation des valeurs...
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Valeur, sens et sensibilité : la polarisation des valeurs...

Valeur, sens et sensibilité : l’épreuve d’une expérience malheureuse

A mon frère Dominique, né en 1943, mort en 1993,

en butte à des taquineries qui moquaient et qui niaient sa sensibilité.

O toi âme sensible puise dans sa souffrance une consolation :

du calice du royaume des esprits, écume jusqu’à lui, sa propre infinité…

    La valeur de la sensibilité n’a pas d’évidence : elle peut bien apparaître aux esprits délicats comme un raffinement et une rareté ; pour les autres qui n’ont pas tant de prévenances, la sensibilité est un aveu de faiblesse et elle est même comme un désaveu de la légitimité de la force, de la puissance et du pouvoir de domination de l’autorité du maître. Il n’est pas rare de voir ainsi des milieux sociaux qui érigent l’anarchie, la brutalité ou la sauvagerie en système idéologique (voir à ce propos le texte de Léon Trosky : Leur morale et la nôtre). Pourtant, en dépit de cette mauvaise réputation qui lui est faite, la sensibilité n’a sans doute jamais  tellement déméritée : le procès qui lui est intenté pour la disqualifier n’a d’autres buts que de l’humilier et de la persécuter : la sensibilité prend souvent ce statut de souffre-douleur et de victime, de bouc émissaire dont on peut se moquer impunément et qu’on peut aisément manipuler sans scrupules.

                Nous serons ainsi amenés à nous demander comment s’opèrent ces retournements de situation qui font devenir noir ce qui a été blanc et blanc ce qui était noir : il s’en faut de peu pour que notre sens des valeurs soit désorienté et inverse ses priorités. De proche en proche, il s’agira de savoir quelles sont les valeurs que nous devons privilégier : à quelles conditions est-t-il possible d’accorder à la sensibilité une valeur éminente ? En raison du devenir et du changement qui le caractérisent, le sensible est traditionnellement opposé à la fixité et à la permanence de l'intelligible. Dans ces conditions, la sensibilité, comme propriété d'un sujet d'être modifié ou informé par le milieu sensible, peut être opposée à la raison et à ses procédures pour accéder à la vérité. Abordé philosophiquement, le concept de sensibilité permet d'évaluer la pertinence du recours aux sens dans la connaissance. Mais, si cette pertinence est le plus souvent limitée, cela ne doit pas occulter le fait, attesté dans le langage, que la sensibilité et notamment la sensibilité communautaire, est l'élément du sens et que, de ce point de vue, il apparaît problématique de penser une signification indépendamment de tout ancrage sensible (on retrouve la même correspondance dans le terme anglais sense et, dans la langue allemande entre sinnlich et Sinn).

                Dans un premier temps, nous verrons comment la sensibilité peut être stigmatisée pour être aussitôt vilipendée, niée et reniée, dévalorisée très notamment par des sensibilités communautaires exacerbées…

                Dans un deuxième temps, constatant tout le mal qu’on a pu faire à cette notion, du point de vue de l’esthétique, nous nous attacherons à montrer que le plus fort n’étant jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir, nous verrons que faire droit à la sensibilité et se faire un devoir de la cultiver sont sans doute les prérequis de toute éducation. Ce sont en effet d’abord, les enfants qui sont le plus sensibles dont il s’agit de former l’informe de leur imagination qui est à l’origine et à la naissance de la sensibilité.

                Dans un troisième moment, nous nous placerons sur un plan éthique et moral : nous tâcherons de bien comprendre comment celles-ci, l’éthique commande les sensibilités communautaires et procèdent de l’équité tandis que la justice et ses impératifs catégoriques procèdent des droits universels et de la morale. C’est en effet sans doute au travers du douloureux sentiment d’injustice que notre sensibilité est la plus mise à mal. Le déshonneur qu’on lui inflige alors nous afflige d’un anéantissement de toutes dignités.

                L’enjeu de cette problématique concerne la possibilité que nous puissions faire encore civilisation : à quelles conditions pouvons-nous espérer pouvoir être capable de sortir de la barbarie ?

                I) Les populations vulgaires, mal dégrossies du sens commun pensent volontiers généralement que la sensibilité est une faiblesse : il ne faut pas trop s’écouter commencent elles par dire et argumenter. La sensibilité, c’est bon pour les mauviettes, pour les filles ou les enfants : quand on est adulte, on doit apprendre à s’endurcir, à se «  blinder » et à ne pas s’en laisser compter par des enfantillages et des sensibleries. La sensiblerie, c’est une sensibilité qui semble outrée, fausse ou exagérée au vu de l'événement qui a déclenché la réaction. Par ces sensibleries, des personnes affectent d’avoir raison de pleurer, d’être froissé ou d’être vexé et de trouver cela insupportable. A l’inverse, les comportements virilistes qui sont cultivés et recherchés par certains milieux professionnels peuvent même devenir lorsqu’ils sont systématisés, peuvent procéder d’une idéologie mortifère qui n’accorde de valeurs qu’à ce qui s’affirme de cette manière : la virilité constitue donc l'attribut principal des hommes, des garçons, dans leurs rapports au monde, aux femmes et aux hommes, à travers les rapports sociaux de sexe. Les rapports sociaux de sexe organisent les représentations et les pratiques des hommes et des femmes en les constituant comme hommes et comme femmes dans des relations de pouvoir asymétriques et hiérarchisées, ce que Bourdieu appelle la violence symbolique (1998). Rassurons ceux qui pourraient être inquiets. Et, il y en a… En critiquant la virilité obligatoire, il n'est bien évidemment pas question de castrer les hommes, ni les hommes habitant les quartiers populaires (motivé-e-s ou non), ni les autres. Le fait de désirer des femmes, des hommes, ou les deux n'est pas en cause. La manière de le faire et/ou de l'imposer, oui ! Le virilisme est l'exacerbation des attitudes, représentations et pratiques viriles. Tous les hommes, parce que hommes, sont (ou doivent être) dominants dans leurs rapports individuels et collectifs avec les femmes. Il suffit qu'une personne soit cataloguée comme appartenant au groupe des hommes pour qu'elle puisse, en droit ou en fait, obtenir une meilleure situation sociale (salaire, sécurité quotidienne, autonomie individuelle, etc.) qu'une autre classée comme femme, tous indicateurs sociaux égaux par ailleurs (classe, âge, origine ethnique, etc.). Mais si tous les hommes sont dominants, tous les hommes ne sont pas les mêmes, ni dans leurs rapports aux femmes, ni dans leurs rapports aux hommes. Certains d'entre eux redoublent de signes et de pratiques viriles dans leurs rapports au monde. Ainsi, toutes les femmes sont, parce que femmes, exposées au risque de violences conjugales par leurs conjoints, mais seules 10% des femmes sont violentées.

                Dans les formes de crispations virilistes les plus marquées, on peut souvent y lire des formes de désespoir, de luttes sociales suicidaires — suicidaires dans la mesure où elles mettent en “ jeu ” la vie de ces jeunes hommes, mais aussi où elles aboutissent à des impasses destructrices des équipements collectifs présents sur les quartiers : il s’agit d’apprendre à souffrir pour être un homme et à accepter la loi des plus grands au statut d'homme, comme lors des premiers apprentissages sportifs, on contraint le garçon à accepter la loi des plus grands, des anciens. Ceux qui lui apprennent et lui enseignent les règles et le savoir-faire, le savoir-être homme. La manière dont certains hommes se rappellent cette époque et l'émotion qui transparaît alors, semblent indiquer que ces périodes constituent une forme de rite de passage. Apprendre à jouer au football, au rugby, au judo, etc., c'est d'abord une façon de dire : “  je veux être comme les autres gars. Je veux être un homme et donc je veux me distinguer de l'opposé (être une femme). Je veux me dissocier du monde des femmes et des enfants. ” Pour cela, il faut respecter les codes, les rites qui sont des opérateurs hiérarchiques, il faut assimiler des codes et des rites, en sport on dit les règles, qui nous oblige à intégrer corporellement (incorporer) des non-dits. Un de ces non-dits, que relatent quelques années plus tard les  garçons devenus hommes, est que l'apprentissage doit se faire dans la souffrance. Souffrances psychiques de ne pas arriver à jouer aussi bien que les autres. Souffrances des corps qui doivent se blinder pour pouvoir jouer correctement. Les pieds, les mains, les muscles… se forment, se modèlent, se rigidifient par une espèce de jeu sado-maso avec la douleur. P'tit homme doit apprendre à accepter la souffrance — sans rien dire — pour intégrer le cercle restreint des hommes. Dans ces groupes monosexués s'incorporent les gestes, les mouvements, les réactions masculines, tout le capital d'attitudes qui serviront à être un homme, un «  vrai ». Dans ces groupes de garçons, on “ entre ” en lutte dite amicale (pas si amicale que cela si l'on en croit les pleurs, les déceptions, les chagrins enfouis qui lui sont associés) pour être au même niveau que les autres, puis pour être le meilleur. Pour gagner le droit d'être avec les hommes ou d'être comme les autres hommes, il faut être initié. Pour les hommes, comme pour les femmes, l'éducation se fait par mimétisme. Or le mimétisme des hommes est un mimétisme de violences. De violence d'abord envers soi, contre soi. La guerre qu'apprennent les hommes dans leurs corps est d'abord une guerre contre eux-mêmes. Puis, dans une seconde étape, c'est une guerre avec les autres. Toujours est-il que dans la socialisation masculine, il faut pour être un homme, ne pas pouvoir être assimilé à une femme. Le féminin devient même le pôle repoussoir central, l'ennemi intérieur à combattre sous peine d'être soi-même assimilé à une femme et d'être (mal)traité comme tel ou comme un souffre-douleur.

                - Nous pouvons exemplifier une telle persécution avec deux personnages : d’abord par le personnage principal de la nouvelle de Nicolas Gogol «  le manteau » : donc Akaki Akakiévitch, petit avec un début de calvitie. Son existence permet celle d'autres personnages : le « personnage considérable », sa logeuse, âgée de 70 ans, le tailleur Pétrovitch, qui a un penchant pour la bouteille, sont les personnages secondaires du récit. Ses collègues, ayant toujours une moquerie à l'encontre d'Akaki, le médecin, le commissaire, les policiers sont les personnages tertiaires de la nouvelle. Il y aussi une allusion à sa mère, dont le nom est inconnu, ainsi qu'à son parrain Ivan Ivanovitch Yérochkine et à sa marraine Arina Sémionovna Biélobriouchkova. Akaki Akakievitch Bachmatchkine, un petit fonctionnaire pétersbourgeois, consacre l'essentiel de son temps à des copies d'actes, tâche qu'il accomplit avec zèle au milieu des moqueries et des vexations. Une catastrophe chamboule un jour sa vie : son manteau, usé jusqu'à la corde, doit être remplacé. Ceci donne subitement une autre dimension à l'existence d'Akaki. Il commence à économiser, kopeck après kopeck, pour se procurer le vêtement dont l'acquisition vire à l'obsession. Il est un homme heureux, le jour où il l'endosse pour la première fois. Malheureusement, en rentrant d'une fête organisée par ses collègues pour célébrer le grand événement, Akaki est agressé et son manteau volé. Pour la première fois de sa vie, le malheureux se révolte contre le sort et entame des démarches pour récupérer son cher manteau. Malheureusement, un « personnage considérable et important » auquel il demande secours s'en prend violemment à lui afin d'impressionner une connaissance qui lui rendait visite. C'est le coup de grâce pour Akaki, qui meurt de froid quelques jours plus tard. C'est alors que commencent à se produire des événements inexplicables : un spectre apparaît dans différents quartiers de Saint Petersburg, effrayant les passants et leur dérobant leurs manteaux. Le fantôme, qui n'est autre que celui d'Akaki, attaque finalement le « personnage important » qui avait renvoyé si durement le petit fonctionnaire et lui vole son manteau. Un nouveau spectre apparaît dans Saint Petersburg.

                - Le Saniette de la Recherche en constitue un autre exemple typique : ancien archiviste, fortuné, issu d’une famille noble (c’est le beau-frère du comte de Forcheville). Homme foncièrement bon et simple, d’une grande timidité, il recherche le contact humain mais fait souvent preuve de maladresse. Il fréquente assidûment le salon des Verdurin qui se disent être ses amis, en fait, il est leur souffre-douleur ainsi que celui de la « petite bande ». Parfois la cruauté des convives à son égard atteint des sommets surprenants. Les Verdurin sont heureux d’avoir tous les soirs à leur table un bouc émissaire mais pour que Saniette n’abandonne pas définitivement leur salon, ils alternent savamment méchanceté et paroles aimables. Lorsque, encouragé par l’acquiescement  des convives, M Verdurin devient par trop cruel et grossier envers le falot Saniette, sa femme intervient pour le tempérer, non pas par bonté d’âme mais tout simplement pour que Saniette ne quitte pas le salon. Mais les rémissions sont de courte durée et les attaques reprennent de plus belle. Malgré les humiliations, Saniette retourne fidèlement chez ses bourreaux comme un chien battu retourne chez son maître (est-ce un hasard si le nom de « Saniette » est l’anagramme de « Sainteté » ?).

                II) Nous avons d’abord considéré les infortunes de la sensibilité : dans ce contexte hostile, les états affectifs de la sensibilité (les sentiments) et les intuitions sensibles de nos premiers élans sont en butte à la raillerie et à la calomnie et ont tendance à être inhibé. Dans leurs expressions naissantes, nos intuitions sensibles appréhendent et s’appréhendent elles-mêmes dans la crainte et le tremblement. Pour que notre sensibilité puisse s’épanouir, elle doit trouver et se situer dans un climat qui doit être apaisé et qui soit suffisamment tolérant pour être à même d’encourager des tentatives renouvelées par des inventions qui peuvent d’abord rebuter. C’est dans les grâces du discernement que l’innocence de l’ingénuité, de l’insouciance ou de la tendresse peuvent commencer : dans la vie ordinaire, nos sensibilités sont brouillées et embrouillées par les expériences malheureuses de la contrariété et de la contradiction. Albert Béguin a pu considérer dans L’âme romantique et les rêves (p 10) que Les souffrances du jeune Werther de Goethe, constitue le paroxysme du triomphe de la sensibilité du romantisme exacerbé du Sturm und Drang : Werther, ce héros dont on apprend le suicide dans cette lettre de L’éditeur au lecteur, s’avère avoir souffert d’une sensibilité exacerbée (Empfindsamkeit). Après Jean-Jacques Rousseau dont l’œuvre met en avant l’individu singulier relié à tous les autres par sa sensibilité, Werther se présente à nous comme l’homme qui n’est pas éprouvé s’il ne s’instruit pas : celui qui est les plus éprouvé, est celui qui s’instruit davantage. De ce point de vue, la sensibilité est l’épreuve  d’une expérience malheureuse qu’on voit à l’œuvre au long des pages de Les souffrances du jeune Werther. Mais il faut mettre en perspective ce dernier livre et Les années d’apprentissages de Wilhem Meister : le dilettantisme de Werther et sa sensibilité esthétique apparaissent ainsi caractéristiques de la conscience shakespearienne du jeune Goethe qui relève du culte du génie. La fin tragique de Werther, théâtrale à souhait et en même temps parodique du drame bourgeois, marque en effet l’anéantissement d’une conception de l’art et de la vocation poétique qui nécessite aussi de repenser le sens même du théâtre dont Shakespeare est la figure emblématique. A l’inverse, les Années d’Apprentissage et le projet de mettre en scène Hamlet dont les traits personnels ne s’apparentent pas seulement à ceux de Wilhelm, mais aussi à ceux de Werther, constituent, dans cette perspective, une entreprise de déconstruction esthétique. Elle met en évidence l’illusion théâtrale qui a pour but de rendre possible à nouveau l’action en inscrivant la subjectivité dans le champ symbolique de son temps. La forme romanesque dans laquelle s’insère le projet narcissique de Wilhelm s’avère le contrepoint de la subjectivité de Werther qui cherche à fuir sa discursivité et son historicité par la polarisation de son récit, mise en scène de lui-même dans un dialogue fictionnel composé de tableaux fragmentaires et d’ébauches qui relancent l’intuition inaboutie et exacerbent le désir. La narration des motivations de Wilhelm et du travail préparatoire que nécessite une représentation théâtrale montre non seulement les mécanismes d’une mise en condition, elle fait ressortir aussi la futilité des espoirs de reconnaissance tout autant que de connaissance de soi que la sensibilité bourgeoise place dans l’institution du théâtre et qui ne dépassent pas la griserie sans lendemain. La pratique esthétique concrète et sa mise à l’épreuve par la décontextualisation romanesque déjouent la représentation sociale d’une subjectivité qui conçoit son destin comme une tragédie de la désillusion narcissique où la réalisation sentimentale et émotionnelle concentre tous les espoirs jadis projetés sur un horizon métaphysique. Elle permet de comprendre l’échec d’une logique fatale où l’exaltation héroïque de soi et de ses qualités psychologiques incomparables, soutenue par la découverte de l’autonomie de la création artistique, déstructure le rapport au réel qui devient le prolongement de fantasmes personnels : la vie devient une scène fantasmagorique où l’illusion d’une réalisation absolue se substitue à la construction d’un destin autonome qui nécessite l’apprentissage de l’altérité et de son intégration. Le mariage d’amour représente ainsi le point secret qui organise la dramaturgie de la sensibilité que compose Werther par ses lettres. Elles sont les traces de sa quête personnelle vers cet équilibre où l’individu comprend le sens de la recherche de soi par rapport au devenir même de l’humanité dans la densité d’un seul instant fugitif et transitoire. Il est ce « point secret […] où le propre de (son) moi, la prétendue liberté de (sa) volonté rencontre le nécessaire développement de la totalité9 » et qui lui échappe en permanence. Son écriture qui, par le style épistolaire, conserve des marques de l’oralité, tend ainsi à une actualisation dramatique, à une polarisation de l’anecdote qui donne à la subjectivité et à ses sentiments une légitimité symbolique dans le réseau de relations qu’elle établit et qui, à ses yeux, constitue son destin, sa nécessité. La pérégrination de l’individu dans l’espace et dans le temps est ramenée à l’échange épistolaire avec l’altérité fictive qui le transcende et qu’il cherche à rejoindre, à égaler, voire à s’approprier comme la représentation de son propre pouvoir créateur qui lui échappe indéfiniment. Le correspondant de Werther n’existe que sous forme de trace, d’antériorité qui motive son écriture et la détermine dans le sens d’un travail de persuasion sans cesse relancé par lequel l’épistolier essaie de se rassurer sur l’efficacité même de son discours. C’est l’intensité de sa propre sensibilité qu’il cherche à mettre en œuvre en érigeant sa cosmogonie subjective par le lien qu’il noue avec cette altérité absente. Elle s’inscrit en lui et il tente de la prendre en compte comme le spiritus rector qui justifie toute son action et toute sa pensée. Ce dernier lui permet de regarder au fond de lui-même et de retrouver, le temps de l’écriture, un accord intérieur qui apaise les contradictions qui le rongent et le paralysent dans la vie quotidienne. Wilhelm, le contradicteur et l’ami qui lui rappelle sans cesse autant la nécessité de se livrer à une activité utile que celle d’être créateur, est celui qui lui donne la possibilité d’entretenir l’illusion de concilier les deux dans les réponses qu’il lui envoie et qui sont l’expression de sa quête d’une situation à l’intérieur d’une société patriarcale fictive qui n’existe que par son écriture, les réminiscences et les projections qu’elle autorise. Aussi le prénom de Wilhelm n’est-il peut-être déjà là pas choisi au hasard d’autant que dans le Wilhelm Meister, le rapprochement avec celui de Shakespeare est fait par le héros lui-même : il est en tout cas le seul lien de Werther avec son passé, seul confident de sa relation tragique avec Lotte. Les lettres qu’il lui a adressées seront la seule trace de son existence, grâce à laquelle il survivra comme un personnage littéraire plus vrai que nature suscitant l’imitation dévoyée de ses lecteurs qui, à la manière de Wilhelm Meister, recherchent dans le théâtre la réalisation de leur vie. Ce n’est pas par hasard que Werther se rachète un nouvel habit bleu et jaune identique à celui qu’il portait lors de sa première rencontre avec Lotte, lorsqu’il est usé (livre II, lettre du 6 septembre), et que Wilhelm Meister s’habille comme Hamlet dans la vie courante à partir du moment où il s’implique dans la mise en scène de la pièce : pour tous les deux, la vie est un jeu de rôle où le sujet sensible s’identifie à une altérité fictive qu’il s’efforce d’incarner pour la ressusciter sous une forme actuelle. La seule différence, c’est que, pour Werther, il s’agit en quelque sorte d’une « auto-fiction ». Deux niveaux à chaque fois se rejoignent pour Werther épistolier comme pour Wilhelm metteur en scène qui se représente lui-même à travers le personnage d’Hamlet : l’antériorité du texte et son originalité d’un côté, et de l’autre, la façon dont elle informe leur rapport au réel qui devient le symbole de l’éphémérité mélancolique de la nature humaine capable de ne subsister que sous forme de trace, d’empreinte, de réminiscence où la mort hante la vie comme le refoulé même de la théâtromanie. Cette dichotomie entre l’écriture et son efficacité immédiate devient ainsi l’expression même du décalage entre l’intuition artistique qui transcende le réel et l’organise en fonction d’une subjectivité souveraine et l’action qui implique la déconstruction de la totalité esthétique dans laquelle elle se projette. Elle l’oppose à l’altérité dans un conflit psychologique. Ce dernier, revêtant la forme de la confrontation idéologique entre bourgeoisie et noblesse, s’attaque au fondement moral de l’autorité patriarcale et de l’ordre qu’elle garantit. Le siècle qui ne sait que faire gicler l’encre se contente de porter le roman familial à la scène. Elle devient le lieu de l’émancipation symbolique du sujet à la recherche de notoriété publique, mais qui se contente de l’abréaction du jeu. L’agressivité contre l’autorité patriarcale y est sublimée par l’écriture dramatique qui permet de s’imaginer à sa place sans la remplacer, et de la remodeler sans cesse selon ses désirs par le palimpseste qui restructure et recompose l’original sous prétexte de renouveler la fidélité à son égard et de l’empêcher de perdre de sa vitalité. Le mariage et l’intronisation en autorité patriarcale représentent en effet pour Werther un fantasme proprement littéraire. Il transparaît dans la réalité quotidienne comme sa trame secrète qu’il s’agit de mettre en œuvre et de révéler au grand jour en la représentant. En livrant le récit de sa relation à Lotte au fil de ses lettres, il développe l’idéal d’une structure mythique, où le sujet se transcende lui-même, parce qu’il relie par son écriture les différentes représentations culturelles de l’humanité pour les inscrire dans une généalogie de la subjectivité qui atteint désormais la conscience de sa maturité dans l’intelligence du corps et de son fonctionnement et qui redoute les effets même de cette révélation. Non seulement il affirme, comme s’il s’agissait d’une vérité éternelle de l’âme humaine, dans la lettre du 21 juin que « le plus inquiet des vagabonds finit par aspirer à revoir sa patrie, trouve dans sa chaumière, sur le sein d’une épouse, au milieu de ses enfants, dans les tâches imposées par leur entretien, la félicité que dans le vaste monde il avait en vain cherchée ». Mais, ce faisant, il relie le sujet en quête de lui-même à l’univers idyllique d’une nature primitive où les temps bibliques de l’Ancien Testament et l’épopée homérique légitiment les aspirations universelles de la sensibilité bourgeoise et de son esthétique comme des revendications sociales symboliques. La mise en scène de l’existence dans un décor bucolique intemporel représente une transgression qui est symbolique d’une révolution conservatrice dont l’inversion, qui permet d’organiser le discours en fonction de la subjectivité et qui est rejetée par l’ambassadeur, est la marque la plus éminente. Elle traduit le désir de fonder la noblesse sur un nouveau principe qui est la sensibilité et le jugement esthétique qu’elle engendre : c’est pourquoi, Werther est choqué quand le Comte de C***, avec qui il partage des goûts similaires et qui lui est apparu comme un esprit ouvert lui demande de quitter sa demeure alors qu’il donne une réception où il ne peut pas le tolérer en raison de son extraction roturière. S’ajoute à cela qu’auparavant, Mademoiselle de B*** lui a montré qu’elle était gênée par sa présence et qu’il s’est donc trouvé abandonné par ceux-là mêmes dont il s’imaginait reconnu pour ses qualités d’âme.

                III) Nous avions d’abord vu comment la sensibilité pouvait être brimée et opprimée par des discours de la force, de la puissance et du pouvoir pour dans un second temps mettre en perspective les deux ouvrages de Goethe : Les souffrances du jeune Werther qui fait de l'Empfindsamkeit le motif et le mobile de la conduite suicidaire de son héros Werther d’abord et Les années d’apprentissage de Wilhelm Meister ensuite dont le héros Wilhelm entreprend de témoigner de lui-même en tâchant de dépasser et de surmonter la gradation du roman d’évolution (la belle âme), du roman de formation (du maître et du serviteur) et du roman d’éducation (L’Emile de Rousseau) : au travers de la vocation théâtrale de Wilhelm qui s’emploie à mettre en scène le Hamlet de Shakespeare, on suit les égarements enthousiastes du personnage avec un humour souriant où les apprentissages de l’amour et de l’art se mêlent avec l’aventure amoureuse et la genèse d’un caractère qui lui permettent tant bien que mal de se trouver lui-même. De proche en proche, il semble bien qu’on peut résumer ces manières de se frayer un chemin dans la vie en tâchant de reconstituer toute la distance qui va de Fichte à Hegel : dans la Doctrine de la science novo methodo, le premier fait du système de la sensibilité l’objet principal de sa recherche « il y a en l'homme un besoin de science et la doctrine de la science se fait fort d'y satisfaire. » La doctrine de la science (dont la nova methodo est la deuxième présentation, que Fichte a proposée à ses étudiants de 1796 à 1799) se veut la doctrine des affirmations qui prétendent à la vérité. Cette prétention à la vérité, structurellement liée aux propositions de la science, peut-elle être justifiée, et si oui comment ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire de s'interroger sur la structure ultime de tout savoir, quelle que soit la particularité de son contenu, et de thématiser les actes fondamentaux en l'absence desquels la raison se détruit elle-même. Tel est le motif principal de la philosophie de Fichte qui, trop souvent réduite aux seuls écrits populaires de l'auteur ou à ses prises de position politiques (la défense de la Révolution française dans les Contributions ou la protestation contre l'invasion de l'Allemagne par les armées napoléoniennes dans les Discours à la nation allemande), fut ignorée en son intention véritablement spéculative : penser la « science de la science », c'est-à-dire limiter les recours trop simples à la croyance pour faire place à la question du savoir alors même que le second (Hegel) dans Les principes de la philosophie du droit souligne que la philosophie ne repose pas tant sur le « cœur » et l’« enthousiasme » (pensée immédiate, traduction Kervégan p. 96), ni sur le formalisme de la « définition », de la « classification » et du « syllogisme » (pensée réflexive, p. 92), mais elle considère le développement vivant et autonome de son objet. Il s’agit d’étudier « la différenciation déterminée des sphères de la vie publique », et comment l’organisation d’ensemble qui « fait naître la force du tout de l’harmonie de ses maillons » (p. 97). On trouve dans la préface la formule selon laquelle « ce qui est rationnel est effectif ; et ce qui est effectif est rationnel » (p. 104). Pour certains, cet énoncé exprime l’adhésion de Hegel au réel tel qu’il est, et notamment son allégeance au pouvoir prussien de l’époque. En réalité, le contexte montre que Hegel, ici, tend à exclure du discours philosophique ce qui relèverait de l’injonction ou du vœu pieux. Pour lui, la philosophie ne doit pas être normative, elle doit se contenter de « penser ce qui est ». Si l’on étudie le concept d’effectivité tel qu’il est présenté dans la Science de la logique, on constate, plus précisément, que l’effectivité désigne le réel en tant qu’il est régi par une règle immanente (ce qui le distingue de cette frange du réel que Hegel nomme le « phénomène ») et qu’un principe n’est rationnel que si, plutôt que de rester abstraitement « pur », il s’inscrit dans le réel. Par la formule sur l’identité du rationnel et de l’effectif, Hegel signifie donc que la philosophie du droit n’a pour tâche ni d’étudier les principes du droit seulement tels qu’ils devraient être, ni le détail infini des réalités juridiques, mais l’incarnation des principes juridiques généraux tels qu’ils sont effectivement dans le réel.

               IV) Conclusion : Paris outragé, Paris brisé, Paris martyrisé mais Paris libéré comme dirait l’autre : les désaveux de la force passent souvent par des aveux de faiblesse. Il faut croire que la traversée de ces mauvaises expériences de la vie peuvent avoir raison des intimidations de la violence fondamentale (jalousie et envie) qui couve à bas bruit dans la communauté des esprits d’une population… Ce qui porte atteinte à la sensibilité, porte aussi atteinte à la personnalité : les irritations de nos scrupules de conscience sont affaire et procèdent de la sensibilité. Qu’ils soient violence ou pathologie, les outrages à la sensibilité sont des biais : nos sensibilités au sens politique, au sens grammatical, au sens de la mesure, au sens des choses, au sens de l’Histoire, au sens du réel, au sens de la Vie, à notre sens de l’orientation en général sont susceptibles de s’informer, de se déformer ou de se transformer : le désir de « donner un sens à sa vie. Du sens des choses. La natura è piena d’infinite ragioni que non furono mai in isperienza. La nature est pleine de raisons infinies qui n'ont encore jamais été expérimentées. La tâche de la métaphysique ou de la philosophie est de nous faire comprendre quelque chose au sens des choses. Ce sens, c’est d’abord celui des choses elles-mêmes, le sens de l’être. En fait, la compréhension ne comprend quelque chose que lorsqu’elle en saisit le sens. Ce sens, ce n’est pas elle qui l’introduit dans les choses (sensus non est inferendus, sed efferendus, dit un précieux adage herméneutique : le sens n’est pas à inférer mais à réaliser, à rendre effectif), elle le découvre et si elle a de temps à autre à l’y « mettre », ou le conjecturer, c’est qu’elle ne le trouve pas d’emblée. Cela présuppose encore que le sens réside avant tout dans les choses. Ce sens peut être, par exemple, le sens d’un texte, que je n’ai pas inventé et que je cherche tout simplement à comprendre, le sens d’une institution ou d’une invention, c’està-dire la raison de son existence ou de son usage, le sens dun organe (le rein sert à ceci, le poumon ou le pancréas à cela), le sens dun geste (qui peut être interprété, parfois surinterprété, comme bienveillant ou menaçant, indifférent ou chargé de sens), le sens du cri d’un nourrisson (qui a mal ou qui veut être nourri, quémandant de l’attention), le sens ou les sens d’un événement (un tel est souffrant parce qu’il a ingurgité un poison ou trop mangé). Dans toutes ces acceptions, le sens n’est pas une création de nos systèmes linguistiques ou culturels, qui feraient écran aux choses, à jamais inatteignables, il est une évidence des choses elles-mêmes : les choses ont un sens, c’està-dire une orientation, une raison, une finalité, une logique, un ordonnancement (le désordre lui-même est un ordre déçu)… Les occurrences les plus fréquentes de la vie ordinaire sont vaines et futiles : les occurrences les plus fréquentes de la vie ordinaire sont vaines et futiles…

               Le sens de la Vie : Téléologique : où va-t-elle ? Sémiologique : que signifie-t-elle ? Axiologique : que vaut-elle ? Ontologique : d'où vient-elle ?

                Qu'il se questionne ou non, l'homme cherche à procréer, travaille à la protection et l'éducation de sa descendance, veut se sentir utile, cherche à repousser la souffrance et la mort, et à accéder à une existence supérieure (sociale ou religieuse). Mais c'est la conscience de sa mortalité qui le pousserait à se questionner, rendrait l'existence « humaine » et, selon Max Frisch, en ferait même « une aventure ». Selon Jean Grondin, la question du sens se posait peu autrefois, car ce sens « allait de soi », il n'y en avait qu'un, et l'homme devait se « conformer » à des rites dans le passage de la vie terrestre vers un au-delà. Quand ce sens a fini par se perdre, en particulier depuis le siècle des Lumières, la question a pris une acuité nouvelle. Selon l'existentialisme, c'est à chaque personne de définir le sens de sa vie. La vie n'est pas déterminée par un dieu super-naturel et l'Homme est libre. Pour Nietzsche, la vie n'est digne d'être vécue seulement si nous avons des buts à atteindre. Il voyait le nihilisme (« tout ce qui arrive n'a aucun sens ») comme sans but. Il n'exclut pas pour autant la possibilité que l'homme puisse faire quelque chose de sa vie, pour lui donner un sens « Qu’est-ce que le bonheur ? Le sentiment que la force croît, qu’une résistance est surmontée ». Pour Albert Camus, pour qui le « sens de la vie » est « la plus pressante des questions » : « Le monde est beau, et hors de lui point de salut. Ce chant d’amour sans espoir qui naît de la contemplation peut aussi figurer la plus efficace des règles d’action ». Le constat d'une vie sans espérance religieuse n'est pas pour autant dénué de sens ni de joie : « On sent bien qu’il s’agit ici d’entreprendre la géographie d’un certain désert. Mais ce désert singulier n’est sensible qu’à ceux capables d’y vivre sans jamais tromper leur soif. C’est alors, et alors seulement, qu’il se peuple des eaux vives du bonheur ». Camus prétend que des âmes lucides et entraînées peuvent trouver un sens à leurs jours, et jouir dans cette plénitude ; alors, vivre est une force.

                Le nihilisme suggère que la vie n'a pas de sens objectif. Friedrich Nietzsche, bien qu'il ait en quelque sorte inventé l'expression, considère que le sens de la vie ne peut être interprété par l'homme qui fait partie de la vie elle-même. Dans le Crépuscule des idoles, il déclare ainsi : « La valeur de la vie ne saurait être évaluée. Pas par un vivant, car il est partie, et même objet de litige ; pas davantage par un mort, pour une tout autre raison ». William Shakespeare fait dire à Macbeth (acte V, scène 5) : « La vie n'est qu'un fantôme errant, un pauvre comédien qui se pavane et s'agite durant son heure sur la scène et qu'ensuite on n'entend plus ; c'est une histoire dite par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien… ». Sigmund Freud « quand on commence à se poser des questions sur le sens de la vie et de la mort, on est malade, car tout ceci n'existe pas de façon objective ».

                Utilitarisme. Les origines de l'utilitarisme peuvent être tracées jusqu'à Épicure, mais en tant qu'école de pensée, Jeremy Bentham est généralement considéré comme son fondateur. Celui-ci décréta que « la nature a placé l'humanité sous le règne de deux puissants souverains, la douleur et le plaisir ». Le but de n'importe quelle action serait d'augmenter notre plaisir et/ou diminuer notre souffrance. Il dérive de cette constatation que « ce qui est bien est ce qui amène le plus de bonheur à la plus grande quantité de personne possible ». Pour Bentham, le sens de la vie est le « principe du plus grand bonheur ».

                Morale kantienne : philosophie pratique de Kant. La morale kantienne est basée sur le travail éthique du philosophe allemand Emmanuel Kant. Kant est connu pour son éthique déontologique où il y a une seule obligation morale, l'impératif catégorique, dérivé du concept du devoir. Chaque action, pour être éthique, devrait être exécutée selon l'impératif catégorique. Expliqué simplement, le test qu'une personne devrait faire pour vérifier la qualité d'une action est de l'universaliser (s'imaginer que tout le monde agit de cette manière) et de vérifier si l'action ne devient pas contradictoire. Kant donne l'exemple d'une personne qui voudrait emprunter de l'argent sans avoir l'intention de la repayer. Ceci est une contradiction, car si elle était universelle, plus personne ne prêterait, car personne ne se ferait jamais rembourser. Le mensonge ne pourrait également pas être universalisé, car le concept de vérité n'aurait plus aucun sens. Ces concepts peuvent être utiles pour essayer de définir à ce que nous devrions faire de notre vie.

                Qu'il se questionne ou non, l'homme cherche à procréer, travaille à la protection et l'éducation de sa descendance, veut se sentir utile, cherche à repousser la souffrance et la mort, et à accéder à une existence supérieure (sociale ou religieuse). Mais c'est la conscience de sa mortalité qui le pousserait à se questionner, rendrait l'existence « humaine » et, selon Max Frisch, en ferait même « une aventure ». Selon Jean Grondin, la question du sens se posait peu autrefois, car ce sens « allait de soi », il n'y en avait qu'un, et l'homme devait se « conformer » à des rites dans le passage de la vie terrestre vers un au-delà. Quand ce sens a fini par se perdre, en particulier depuis le siècle des Lumières, la question a pris une acuité nouvelle.

                Ce questionnement a conduit les philosophes à des réflexions divergentes. Quête de la connaissance. Platon, un élève de Socrate, était un des premiers philosophes et un de ceux qui ont eu la plus grande influence. Sa renommée vient de sa théorie idéaliste des choses universelles. Sa Théorie des Formes propose que les objets et les concepts ne sont que des copies d'Idées immatérielles et parfaites, qui existent indépendamment de leur version sur Terre. Selon le Platonisme, le sens de la vie serait d'obtenir la plus haute forme de connaissance, l'Idée du Bien; l'idée d'où dériverait toutes les choses bonnes et utiles.

                Selon l'hindouisme. Dans l'hindouisme, Purushartha est la notion qui désigne le « sens de la vie »17,18. Elle se décompose en dharma (devoir), artha (prospérité), kama (plaisir) et moksha (libération). Selon le bouddhisme. Les quatre nobles vérités indiquent ce qu'il est essentiel de savoir pour un bouddhiste. Elles énoncent le problème de l'existence, son diagnostic et le traitement jugé adéquat : la vérité de la souffrance : toute vie implique la souffrance, l'insatisfaction ; la vérité de l'origine de la souffrance : elle repose dans le désir, les attachements ; la vérité de la cessation de la souffrance : la fin de la souffrance est possible ; la vérité du chemin : le chemin menant à la fin de la souffrance est la voie médiane, qui suit le noble Chemin octuple. Il n'y est pas fait mention d'âme ou de jugement mais de nirvana, résultant de la fin de la souffrance incarnée (du cycle des incarnations successives).

                Sens de la vie en religion. Si, selon la conviction de nombreuses religions (mais pas toutes), le corps est le véhicule d'une âme, la réponse de ces religions est que le sens de la vie réside dans la valeur de nos actes dans l'attente d'une forme de « jugement » divin, pouvant se produire après la mort ou à chaque instant de la vie, et déterminant la qualité de la vie après la mort, de la vie éternelle ou de la prochaine réincarnation. Selon le christianisme. Selon le point de vue chrétien, l'homme existe pour rencontrer Dieu, par la croyance en la résurrection de Jésus, qui scelle la victoire de la vie sur la mort, et qui est célébrée tout particulièrement le jour de la fête de Pâques.

                L'encyclique Fides et ratio aborde la question du sens de la vie sous l'angle philosophique et des rapports entre la foi et la raison. Dans cette encyclique, Jean-Paul II rappelle que l'objectif de la philosophie doit être tourné « vers la contemplation de la vérité et la recherche de la fin dernière et du sens de la vie ». Il constate par exemple que « le scientisme considère comme relevant de l'irrationnel ou de l'imaginaire ce qui touche à la question du sens de la vie. ». Il existe une notion protestante selon laquelle c'est par la grâce, à travers la foi en Dieu, que l'homme est réconcilié avec son créateur (grâce au sacrifice de Jésus-Christ).

 

 

Publié dans Philosophie

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P
Il importe au plus haut point de comprendre, de nous apercevoir que cette polarisation des valeurs, procède de ce bien connu biais cognitif qui consiste à nous agréger (dans les réseaux sociaux) à ceux qui ont des valeurs proches de les nôtres, de préférence à ceux dont les valeurs sont en dissonance avec les nôtres...
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P
La sauvegarde des valeurs présuppose l'abandon de la défense des intérêts...
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P
Il n'y a pas de sauvegarde des valeurs sans défense des intérêts...
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P
C'est très mal rédigé mais je ne sais pas si j'aurai le courage de le reprendre sans utiliser des emprunts extérieurs : il faut peut-être se laisser le temps d'assimiler, c'est un travail difficile et pénible et je me sens découragé et fatigué...
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